C'est parfait, Eddy vient de décrocher un rencard avec la belle Alolienne ! Un rencard qui tombe pile autour de la fête des amoureux, il y a des coïncidences qui ne trompent pas. Il imagine déjà l’emmené manger à la Bella Note, un restaurant chic de Bourg-Asque servant divers pizzas et assiettes de pâtes. Peut être que comme dans ce film, la Couafarel et le Grondogue, ils partageront un spaghetti jusqu'à s'embrasser à la fin, mais ça n'arrive que dans les films. Depuis qu'elle a accepté, il arbore un immense sourire, ne pouvant s’empêcher de s'imaginer comment la soirée va se dérouler et alors qu'ils se font leurs au revoir, il continue de rêvasser. Il sert ses clients en se demandant ce qu'il devrait porter ou ce qu'il devrait éviter. Peut être que s'habiller trop sérieusement sera suspect mais trop décontracté ne donnerait-il pas l'impression qu'il ne fait pas d'effort ? Devrait-il, pour la première fois depuis un long moment, réellement serrer sa cravate ? Trop de questions se bousculent dans sa tête. Et si elle n'aimait pas le restaurant, ou pire encore. Elle vient d'Alola, comment réagir si elle demande de l'ananas sur sa pizza ? Ce n'est pas son premier rendez-vous mais il doit bien avouer qu'il s'agit du premier sur Ankora, la pression est donc d'autant plus grande.

Mais la soirée ne devrait pas poser trop de problème, il se pose bien trop de questions. Ils dîneront, s'amuseront et finiront pas rentrer à pied. Après tout le restaurant n'est pas très loin du bar. Il aimera sûrement lui proposer un dernier verre dans son logement plutôt que dans le bar. Mais si elle refuse ? Comment rester digne après un râteau au pied de chez soi ? Et pourquoi refuserait-elle de toute façon ? Après tout, quand il lui à proposé de l'accompagner un soir, elle a bien du comprendre qu'il s'agissait d'un rendez-vous. Qui pourrait même compter comme un troisième rendez-vous si l'on considère qu'ils se sont vu deux fois seul à seul depuis qu'ils se connaissent. Dans des contextes très différents certes mais ils ont tout de même eux l'occasion d'échanger, d'apprendre à se connaître à s’apprécier. Il n'y a aucune raison de redouter cette soirée ! Il en a vu d'autres après tout. Il n'y a pas de raison que les rendez-vous sur Ankora soit plus difficile qu'ailleurs.

Il arrive à se convaincre que tout se passera bien. Qu'une fois au pied de son appartement, il lui proposera un verre, l'embrassera et que la suite n'appartiendra qu'à eux. Après tout, que pourrait-il lui arriver de pire, qu'elle lui apprenne au pied de son appartement qu'elle n'est pas intéressée par ce qu'elle préfère les femmes ? Impossible, Eddy à du flair pour ses choses là. Il l'aurait vu tout de suite si elle était de ce bord ! Du moins c'est ce qu'il imagine.

Un magnifique petit être à la peau rosé, aux yeux pleins de malices et au visage plus mignon que celui d'un Germingon. Ce pokémon plein de vie se pavane au milieu de la route principal, comme si celle-ci lui appartenait. Il empêche les gens de circuler, fait dévier les vélos et se décaler les piétons mais les gens ne lui en veulent pas. Comment lui en vouloir en cette période de fête ? Après tout, il a la couleur adéquat pour la journée. Il agite sa petite queue de gauche à droite, tel un balancier, en jetant des regards attendrissant aux passants. Il espère sûrement que quelqu'un lui donne quelque chose à manger, à moins qu'il ne pense à rien. Car ses yeux pétillant reflète aussi la lenteur et le manque de discernement typique de ce pokémon. En effet, ce n'est pas un Sucroquin qu’aperçoit Eddy, mais un Ramoloss. Celui-ci à du quitter les siens et se perdre à Bourg-Asques ou est accompagné d'un dresseur qui serait entré dans une boutique sans lui, le pokémon se serait sûrement dit que l'endroit le plus pratique pour l'attendre serait en plein centre du passage. Eddy s'approche alors de lui, l'observant avec le même regard vide que le pokémon. Ce n'est pas du tout un pokémon comme lui qu'il cherchait mais il est si chou, Alors peut être que les cœurs n'ont d'effet que sur les Sucroquins mais qu'est ce qui lui empêche d'en offrir un à ce Ramoloss ? Mieux, il pourrait utiliser cette friandise pour le faire quitter la route. Cherchant l'un des cœurs en sucre dans le sachet qui lui a été confié, il le présente devant le pokémon. Le Ramoloss ouvre alors la bouche de manière très lente, s'attendant à ce que l'humain vienne y déposer la sucrerie. Mais après deux longues minutes sans qu'il ne se passe rien, il se résigne à aller la chercher. Allongé sur le ventre, se redresser sur ses quatre pattes sonne comme une épreuve, un exercice d'endurance aussi mou que douloureux. Heureusement, il y arrive après moult effort, passant paresseusement une patte devant l'autre pour approcher du biscuit. C'est alors que l'humain devient un traitre ! Eddy se recule quand le pokémon avance, il fais un pas en arrière à chaque fois que le Ramoloss fait un pas en avant. Quelle ordure ! Le pokémon eau est obligé d'accumuler huit pas pour obtenir sa friandise, huit ! De petits pas faible qui le porte sur le côté du chemin avant de le faire s'effondrer à nouveau sur le ventre. Fort heureusement, Eddy lui laisse le cœur en sucre et lui en offre même un second pour l'effort réalisé. Laissant le Ramoloss et son sourire béat continuer d'attendre ce qu'il attendait initialement. Même si il y a fort à parier que même lui ne sait pas ce qu'il attend. Même attendre Godot semble plus réalisable que d'imaginer ce que peut espérer trouver un Ramoloss dans une rue commerçante.

"Heureusement, il n’y a pas non plus de quoi en parler toute la journée, et de toute façon, Alys lui a bien changé les idées en décidant de lui offrir des chocolats. Et heureusement qu’elle a précisé "en toute amitié", hein ! Parce qu’il était déjà rouge de gêne en réalisant qu’une fois encore, il acceptait un cadeau sans rien avoir en retour pour son amie. Et il se sentirait con de lancer un "Ah en fait, moi aussi je vais t’en acheter !". Surtout qu’il a pas une thune, le Jojo ! Faudra vraiment qu’il se rattrape la prochaine fois ! En attendant, le paysan se montre plutôt pensif.

Faut dire que le saint valentin, sur l’ancien continent, ça lui arrivait d’y penser. Il se souvient de cette jeune rouquine avec qui il a grandi dans son village d’enfance. Elle était un peu bête, mais… toujours agréable. C’était même la seule du village à vraiment l’être : agréable. Alors voilà : chaque année, à cette période de l’année, il s’imaginait invitant la jeune fille à sortir, pour de bon. Il s’y est même essayé, une fois ! Mais bon… elle n’a pas compris la demande, et lui n’a pas eu le courage d’insister.
De toute façon, c’était une cause perdue. Le patriarche de la demoiselle était un véritable mur, impassable pour le pauvre hippie qu’il était à l’époque. A-t-il changé depuis ? Un peu… Disons que même à ses yeux, il était pire avant. C’est dire !
Pourtant, il aurait aimé y croire, ne serait-ce que pour une soirée… avant de se faire enterrer vivant par ce cher paternel. Il l’aurait préparé la pièce aux décorations de l’amour, l’aurait charmée de sa guitare et… Et non, ce n’était pas du tout son genre. À coup sûr, elle lui aurait proposé une partie de chasse de saint-valentin. À défaut de pouvoir offrir son cœur à l’autre, celui d’un Haydaim fera l’affaire ?
Pour sûr, la soirée aurait tourné au fiasco. Oubliez les tourtereaux qui se cajolent toute la nuit à la lueur des bougies ! Madame était une rustre, et… c’était un peu ce qui faisait son charme. Aussi brutale qu’innocente. Mais surtout, toujours le cœur ouvert pour ceux dans le besoin. Et bon sang, qu’il l’était, lui, dans le besoin ! C’est à se demander s’il aurait tenu le coup, à l’époque, sans cette présence chaleureuse à ses côtés ? S’il avait dû se contenter de s’enfumer le cerveau pour traverser chaque jour jusqu’au suivant.
Vraiment, il regrette. Pourquoi ne lui en a-t-il jamais parlé ? Est-elle au moins en vie, aujourd’hui ? Jojo n’a aucune nouvelle du village. Et il n’a aucun intérêt à en reprendre. Tout ce qu’il en reste, ce sont ces soirées qu’il peut s’imaginer dans sa tête. Des soirées qui n’ont même pas existées. De vulgaires films imaginaires d’un jeune Jojo qui s’attachait à la seule personne qui l’appréciait vraiment.
Que serait-il arrivé s’il l’avait invitée ce jour-là ? Enfin, mis à part un décès dû au paternel. Son amie se serait-elle braquée ? Aurait-elle accepté ? Aurait-elle apprécié ? Auraient-ils… non, je ne finirais pas cette phrase ! Le mystère, c’est bien, encore plus dans les suppositions !

Bref, il ne remontera pas le temps de sitôt. Jojo a un petit sourire en repensant à cette histoire. Il se rappelle les déprimes, rien qu’en y pensant, de ces dernières années. Mais aujourd’hui… Il a l’esprit bien trop occupé pour se perdre dans ce genre de morosités. Ankora aura été une bonne chose. Cela lui a permis de tourner la page. Cette soirée guitare, chasse et autres folies n’a jamais eu lieu, et elle n’aura jamais lieu. À la place, Jojo se trimballe une colonie de Fermite… et ce n’est surement pas plus mal. Au moins, ça lui évite l’engueulade du paternel."