La ranger au nidorino, celle qui s’oppose avec le plus de force au projet de remonter après les efforts collectifs pour escorter un tadmorv d’Alola maintenant perdu dans la masse de ses congénères, fait la moue puis semble presque scandalisée de l’analyse sur leurs performances. Ce n’est pas parce qu’ils ne se sont pas jetés sur les pokémons sauvages pour les passer à tabac qu’ils n’auraient pas géré la situation tout de même ! Plusieurs autres rangers ne savaient pas trop comment se positionner, celle au lewsor qui avait tout de même été piétinée quelques minutes auparavant s’approche avec un peu de compassion.
- On devrait sans doute rentrer effectivement, elle a raison on ne doit pas être assez nombreux…

L’analyse de Darell semble renforcer les propos d’Aloy de toute façon, et le chef d’escouade qui paraissait hésiter à appeler des renforts en entendant la civile n’a pas trop de mal à se ranger à l’avis général. Il y a un peu trop de pokémons qui ne leur appartiennent pas dans les parages, et bien que le conflit semble pour l’instant interrompu l’ambiance n’est pas pour autant à la fête.
C’est ce qui rend d’autant plus surprenant le revirement de Darell, surtout qu’il déclarait exactement l’inverse quelques instants auparavant. Le ranger blond au magnéti hausse un sourcil, pouce enfoncé dans sa ceinture réglementaire en écoutant l’exposé, sa collègue au nidorino et à la carte reprend un peu espoir, celle au lewsor qui se tient encore les côtes vérifie surtout que personne ne s’affole aux alentours.
Le plan paraît risqué. Il l’est, à plus d’un titre. Ce n’est pas véritablement un plan en fait, plutôt l’ébauche de quelque chose. Mais quelque chose passe dans les yeux des rangers qui s’échangent des regards, y compris avec leurs chefs. Chez les pokémons, les plus malins comprennent aussi ce qui est en train de s’ébaucher et traduisent les intentions humaines aux autres. Cela a une toute petite chance de marcher.
- Pour les tadmorvs d’Alola, vous devez avoir raison… commence la ranger spécialiste des colonies poison d’un air peu assuré. C’est pour les autres que j’ai plus de doutes. Attendez, mon nidorino va essayer de leur expliquer avec moi, je ne garantis rien.

La jeune femme en rouge se tourne vers son partenaire qui a déjà essayé d’engager la conversation avec les tadmorvs violets. C’est bien sûr le grotadmorv dirigeant l’escouade qui est son interlocuteur principal, encore que les autres écoutent avec attention. Le pokémon évolué n’a pas encore l’air très convaincu, et les tadmorvs verts de l’autre côté lui renvoient volontiers des regards suspicieux. Des guerres de territoire ne peuvent pas se résoudre en une minute, surtout après une attaque.
Le chef de l’escouade de son côté, reprend un peu d’espoir en voyant que personne ne recommence à s’entretuer, la proposition a l’air intéressante à plus d’un titre.
- Je peux toujours appeler des renforts comme vous le suggériez, commence-t-il main sur son matériel pour montrer qu’il est sérieux. Mais cela ressemblerait beaucoup à un coup de force, et même pour chasser des pokémons qui ne sont pas natifs de la ville et envahissent le territoire des autres je ne sais pas si c’est une si bonne idée. Réussir à rallier tous les pokémons poison je suis pour, impressionner les rongeurs pourquoi pas, mais si nous arrivions à les convaincre de partir d’eux-mêmes ce serait formidable. En trouvant une alternative acceptable pour eux je suppose.

C’est évidemment en ranger qu’il parle, incapable d’envisager nuire à une espèce de pokémons même pour en protéger d’autres, ou en tout cas pas tant que le conflit peut être évité. La question demeure, qu’est-ce qui reste plus attractif pour des rattatas qu’une ville humaine entière, malgré les prédateurs qu’elle abrite aussi ? Du côté de cette ligue empoisonnée, la situation ne semble pas toute prête non plus, la ranger se relève avec une légère grimace après avoir essayé de deviner le maximum de choses de son partenaire.
- Comme je le craignais, les tadmorvs ne sont pas forcément très chauds. C’est à leur chef qu’il faudrait aller parler directement, et on a intérêt à préparer de bons arguments pour le convaincre. Ce commando veut bien nous escorter si j’ai tout compris, mais je ne garantis pas que ce soit sans risque.
- On peut aussi aller voir les miamiasmes, suggère la seconde ranger. Ils ont l’air un peu plus enthousiastes déjà !

Parler d’enthousiasme est peut-être un peu fort, mais c’est vrai que les pokémons d’Unys affichent moins de réticences et plusieurs ont même retrouvé de grands yeux curieux après avoir arrêté de pleurer. Difficile de leur reconnaître un leader dans cette masse uniforme, mais ils seront sans doute plus facilement attirés par une alliance inter-espèce. Ce qui s’explique, comme vous l’apprend rapidement la ranger à la carte, par le fait qu’ils sont sans doute les moins forts des colonies en présence et qu’ils ont tout à y gagner. Il faudra certainement convaincre le chef aussi, mais avant cela se décider sur une direction et une méthode. Ainsi que régler la question de l’appel des renforts, restée en suspens.

En premier lieu, la majorité semblait pour le fait de rentrer jusqu'à ce que Darell évoque un avis différent. Dès lors il y eut des revirements. Dans un sens ce qu'il disait n'était pas faux. S'ils arrivaient à leur faire comprendre qu'ils étaient tous des alliés contre les rongeurs, ils seraient amenés à coopérer et à aider l'équipe à en finir au plus vite. Pour ça, il fallait qu'ils soient réellement de leur côté, sans faire de sale coup par derrière et rien n'était assuré.

Trouver une alternative acceptable... S'était bien beau, mais dans la réalité aucun de leurs rangs n'avaient d'idées là dessus et à part rassembler tout les typés poisons, ou impressionner par le nombre, pas d'autres solutions venaient. Il n'y avait que la force en idée première... Après laquelle était la moins à risque? Fallait se fier aux ranger ou à la technique des combattants?

" Si vous pensez pouvoir gérer, il vaut mieux s'en tenir à l'alliance des typés poisons contres les rongeurs que par l'unique force de l'Homme. Les Humains risqueraient d'autant plus de tensions envers tout les pokemon. Par contre, faut vraiment qu'ils nous acceptent comme faisant parti de leurs clans et que ensemble ont forme un seul groupe... Si non... On sera en plein carnage."

Dit elle en avalant sa salive. Sachant que toutes ses créatures étaient de tailles plus ou moins correctes. A imaginer un alpha en face... Il n'y avait plus de blessures plus ou moins graves, mais la mort assurée!

" Hum... Vu comme ça... Je dirai que de commencer par les Miamiasme prouverait un argumentaire de talent de plus pour le leader des Tadmorv. On peut toujours se diviser en deux sous groupes dont Darell avec les Tadmorv, mais je trouverai ça risqué, même si ça nous ferait gagner du temps. Du coup je pense vraiment qu'il faudrait tenter les Miamiasme ensemble, revenir avec le leader pour prouver un argumentaire de poids auprès du leader des Tadmorv. Puis vous tous ensemble, je suis sure que vous serez de taille à donner des argumentaires supplémentaires un par un. "

Sur ce, elle se tut et laissa les autres s'exprimer sur son plan.

Darell rechaussa ses lunettes sur son nez avant de hocher la tête.

« Je suis également d’accord. Faire venir plus de monde pourrait effectivement améliorer nos chances d’avancer sans encombres, mais le message qu’on enverrait tant aux Pokémon Poison qu’aux Rattatas risque d’être mal interprété. Après tout, qu’on le veuille ou non, nous restons sur leur territoire. En revanche… Je ne sais pas si on va vraiment pouvoir leur faire accepter de former un seul clan -ça reste des espèces avec des comportements différents-, mais une alliance temporaire pourrait être envisageable… »

Le Rhodesien croisa les bras en réfléchissant aux suggestions d’Aloy, le regard perdu dans le vide comme il mettait de l’ordre dans ses idées.

« Hum… Le souci, c’est que je doute qu’avoir l’accord d’un groupe parvienne à influencer les autres pour qu’ils nous rejoignent, puisqu’ils restent des rivaux sur les questions de territoire, qui un sujet très épineux pour eux en ce moment comme nous avons pu le voir… Il réajusta ses verres. ... Mais on peut toujours essayer de leur parler. Dans le pire des cas, ils refuseront. »

Là-dessus, et sans explication supplémentaire, la grande perche rose se sépara de la petite troupe d’humains pour s’approcher des amas de pollution violets, accompagné de Switch. La puanteur devint difficilement soutenable à leur proximité, en particulier avec la présence du Grotadmorv dont les effluves nauséabondes lui arrachèrent quelques larmes alors qu’il se tenait à une dizaine de mètres. Combien aurait-il donné pour que Griotte lui soulage les narines… Mais une apparition du fruit conscient était beaucoup trop risquée s’il ne voulait pas que les rats submergent l’un des rares endroits où ils ne grouillaient pas encore.
Et puis, Darell s’immobilisa devant le leader présumé. Il demeura ainsi pendant une dizaine de secondes, au point de paraître bien ridicule aux yeux des Rangers et des créatures, comme il organisait ses pensées. Enfin, il se racla la gorge, en partie pour annoncer qu’il allait commencer, en partie pour tenter de dégager l’air pestilentiel qui lui agressait la trachée.

« Cyanide, tu veux bien m’aider à traduire ? » demanda-t-il d’abord à son nouveau Tadmorv parme.

Celui-ci parut surpris, et s’approcha lentement de son ancien chef, non sans s’aplatir à mesure qu'il s’avançait vers lui en signe de déférence. Dans un immonde gargouillis, il fit signe à l’analyste environnemental qu’il était prêt.

« Bien. Alors… Je sais que vous avez tous de gros problèmes de territoire et de ravitaillement à cause des Rattata, au point que vous en êtes réduits à vous affronter avec les autres groupes de type Poison pour des miettes, commença-t-il de sa voix monocorde, qui devait sonner comme absolument pas convaincue aux oreilles des êtres corrompus. Je comprends parfaitement vos difficultés, et je suis loin de les nier. Cependant, à vous affronter entre vous, vous ne faites que le jeu des Rattata. Vous perdez vos forces pour de faibles gains, et ils n’ont plus qu’à se montrer pour grignoter encore vos ressources. Pourtant, vous auriez beaucoup plus à gagner si vous acceptiez de faire une trêve entre vous pour faire front face à cet ennemi commun, vous ne pensez pas ? Ah, rassurez-vous, je ne vous demande pas de ne former qu’une seule horde. Même si je ne suis pas expert en la matière, j’ai déjà pu suffisamment vous observer pour comprendre que chacun de vos groupes a son propre fonctionnement etc. Et ce serait complètement stupide de notre part de vous imposer de toujours coexister comme si vous faisiez partie de la même espèce sous prétexte que vous partagez le même type, et… »

Un gargouillis confus interrompit son monologue digressif. Il baissa ses yeux dorés pour voir un Cyanide qui le regardait avec des yeux mystifiés, complètement perdu dans ce qu’il voulait dire. Et si son nouveau Pokémon le considérait ainsi, il n’osait pas imaginer l’impression que le redoutable amas de toxines devait avoir de lui présentement...

« Hum, bref… reprit-il après un instant de flottement. Ce que je vous propose, c’est de vous tolérer pour collaborer le temps que cette crise soit résolue. Ca devrait être l’affaire de quelques jours, quelques semaines tout au plus. Ensuite… Eh bien, vous pourrez décider comme vous l’entendrez du partage de territoire des Égouts. Qu’en dites-vous ? »

Difficile de dire si ses arguments logiques avaient fait mouche, avec son charisme inexistant… Mais si le Grotadmorv donnait son accord, ce serait déjà un gros avantage.

La plupart des membres du groupe semblent assez d’accord avec l’analyse d’Aloy, surtout qu’elle met en avant une solution plus pacifique que se lancer dans une bataille groupée pour commencer. Voilà qui correspond pas mal à la philosophie des rangers, leur chef pianote sur son appareil de fonction au lieu d’appeler la base en urgence.
- Vous avez sans doute raison, tentons une approche diplomatique avant toute chose. J’ai demandé des équipes supplémentaires au cas où, mais pour l’instant elles ne descendront pas dans les égouts. Les collègues vont rester près des entrées pour intervenir plus vite si ça dégénère.

Ce qui n’est sans doute pas une mauvaise chose, vu la profondeur à laquelle votre groupe est descendue en cas de réel danger économiser le temps de déployer des équipes depuis le quartier général ne sera jamais perdu. Pour le reste, aucun ranger ne relève le commentaire sur leur capacité à gérer la situation ou non, personne ne souffre de problème d’ego dans cette brigade et aucun ne se risque à s’avancer sur la suite des événements. Les professionnels en rouge ne peuvent pas non plus garantir que l’idée de convaincre un groupe de pokémons poison avec le dirigeant d’une autre espèce puisse fonctionner, mais ils n’ont sans doute rien à perdre à essayer le plan d’Aloy. La ranger qui a failli se faire piétiner a l’air bien de son avis quand au fait d’aller voir les miamiasmes moins agressifs par ailleurs, pour les autres c’est difficile à déterminer tant qu’ils écoutent la dresseuse sans rebondir sur ses propos.
Si Darell paraît rapidement d’accord sur le point des renforts, ce qui tombe assez bien vu que les équipes supplémentaires doivent déjà être en route, ses réserves sont aussi compréhensibles et nul ne s’attend à ce que ce soit particulièrement facile ou rapide. Quant à la discussion qui s’engage entre le chercheur aux cheveux roses et sa camarade de mission, les rangers ne savent pas trop où se positionner entre le fait que les groupes cités se détestent mutuellement depuis des lustres et que ce ne sera effectivement pas facile à surmonter, et l’influence des meneurs de chaque colonie. La ranger plus spécialiste des poisons que les autres à force d’avoir étudié le type de son nidorino partenaire ne semble d’ailleurs pas du tout convaincue qu’un simple refus soit le pire qui puisse arriver.

En revanche tout le monde s’accorde pour regarder le scientifique avec des yeux de plus en plus ronds quand il se lance dans son monologue à destination des tadmorvs donc. La ranger au lewsor se fait la remarque que finalement la visite aux miamiasmes n’a pas l’air prévue pour tout de suite, quand sa collègue se demande pourquoi on essaie de convaincre le groupe qui avait déjà accepté de les accompagner jusqu’à leur propre colonie. Enfin le chef lui, observe avec intérêt les tadmorvs plus colorés murmurer entre eux au fur et à mesure de Darell déroule son argumentaire, et l’eau du canal s’agiter de borborygmes en guise de signal d’une présence bien plus massive qui a aussi l’air à l’écoute. Après tout, le groupe d’humains est bien sur le territoire des tadmorvs d’Alola.
C’est à la fin de ce monologue presque plus long que ce que les rangers attendaient, que la plus proche de Darell toussote dans le silence relatif qui est revenu.
- Euh oui, joli discours. Plus qu’à le refaire devant leur chef, ça fait un bon entraînement !
- En attendant, enchaîne le chef qui voudrait bien ne pas perdre l’attention de tout le monde, ça ne résout pas la marche à suivre pour la suite. Est-ce qu’on applique l’idée de se séparer pour voir les deux colonies ? Je suis d’accord à la fois sur le risque supplémentaire que ça va entraîner, et sur le fait que ça nous fera aussi gagner pas mal de temps. Si tout fonctionne comme on l’espère.
- Il y a aussi une autre possibilité, suggère le ranger qui a le moins parlé jusque là. Maintenant que vous avez observé comme vous le vouliez, je comprendrais que vous vouliez remonter au lieu de prendre tous ces risques. Ca reste dangereux, et c’est notre travail pas le vôtre après tout.

Le ranger au magnéti n’a pas tort, et leur chef doit en convenir. Les rangers ont déjà une assez bonne démonstration du discours à servir aux pokémons poisons, et les envoyés de la championne locale n’ont peut-être pas envie de continuer plus loin. Celle au lewsor constate avec plaisir que les miamiasmes ont l’air faciles à rallier aux arguments entendus, ils étaient déjà les moins agressifs et certainement ceux qui ont le plus à y gagner, et si les tadmorvs violets sont sans doute encore davantage dubitatifs ils perdent peu à peu leur agressivité au profit d’une perplexité générale dans leurs rangs. Certains ont même commencé à échanger des grognements brefs avec d’autres tadmorvs d’Alola.

En entendant la remarque des Rangers, Darell se retourna vers son groupe et les considéra de son flegme stoïque. Au point de pouvoir les rendre mal à l’aise au bout de quelques secondes de flottement. Ah ? Il avait donc mal compris ce qu’ils attendaient ? Il s’était visiblement adressé au mauvais groupe de créatures. … Zut, dans ce cas son argumentaire allait être encore moins convaincant s’il ne faisait que se répéter.

« Ah… Oui, » fit-il en réajustant ses lunettes, de sa voix monocorde qui ne trahissait rien de son embarras.

Comme il s’éloignait des Tadmorv kantonnais pour approcher ceux des îles, Happiness se passa une main gluante sur le visage. Eh ben dites donc, l’humain qu’elle avait accepté de suivre avait l’air débrouillard, tiens… Enfin, au moins ses lointains cousins violets font un premier pas encourageant vers les siens, appuyés de Cyanide. Comme quoi, tout n’était pas forcément à jeter chez cette grande perche rose.

« Hum… Je suppose que vous m’avez entendu, du coup… Bredouilla le Rhodesien en se grattant légèrement la joue, cherchant encore son approche. Au risque de me répéter, je maintiens que vous avez tout à gagner à mettre temporairement vos différends de côté pour faire front. Nous-mêmes, humains, vous accompagnerons, en gage de bonne volonté et pour s’assurer qu’aucun de vos groupes ne sera exploité par les autres. Un peu comme ce que nous avons fait tout à l’heure, en somme. »

Il ne voyait pas vraiment quoi ajouter de plus…
En revanche, il se tourna d’un coup vers le meneur du groupe en l’entendant suggérer de se séparer.

« Je ne suis pas d’accord. Si nous nous séparons alors que nous venons justement de leur proposer de s’allier, ça risque d’envoyer des messages contradictoire. Mieux vaut lancer un premier… Assaut, à défaut d’un meilleur terme, tous ensemble, pour leur prouver que ce que nous avons avancé ne sont pas des paroles en l’air. Si nous réussissons, je pense qu’ils auront suffisamment confiance en nous et en cette stratégie pour envisager de faire des groupes plus réduits. »

Maintenant, il restait à espérer qu’ils avaient su les convaincre. Plus ils seraient nombreux, plus leurs chances de reprendre du terrain seraient élevées.

Le seul ranger homme à part le chef d’escouade secoue la main l’air de dire “d’accord, d’accord” lorsque Aloy confirme le refus de retourner à l’abri.
- Je ne voulais pas vous vexer madame. Votre plan a l’air bon autant l’appliquer vous avez raison, même si je sais pas trop pour combien de temps on en a encore.

La remarque mérite d’être soulevée, il ne faut pas croire que convaincre totalement trois colonies de pokémons antagonistes par nature va se faire en un claquement de doigts. Si ces groupes rencontrés par hasard voient l’intérêt immédiat de suspendre les hostilités, en particulier parce qu’ils arrêtent ainsi de prendre des coups, cela ne veut pas dire que les colonies toutes entières sauront oublier leurs querelles ancestrales même pour ce bon vieux principe d’ennemi commun.
Les miamiasmes, qui semblaient déjà les plus enclins à adhérer aux belles théories humaines, sont en revanche totalement perdus devant les phrases à la fois courtes et prononcées si distinctement par Aloy, comme si elle avait peur qu’on ne l’entende pas. Les plus jeunes du groupe sont amusés des gestes qu’ils essaient de reproduire à leur manière, mais les aînés et surtout celui qui semble être leur dirigeant du moment regardent la dresseuse blonde comme si elle avait de la fièvre et qu’il fallait s’inquiéter de lui prodiguer des soins. Autant le discours du dresseur rigolo avec ses cheveux roses comportait beaucoup de mots compliqués, autant là c’est un peu court jeune fille. La ranger possédant le seul pokémon de type psy de l’assemblée, qui se demande aussi pourquoi on a brusquement changé à ce point de ton, semble curieusement à l’écoute non pas d’un autre humain de son propre lewsor.

Du côté des tadmorvs, les spécimens à dominance verte hésitent entre être flattés d’avoir de nouveau droit au discours juste pour eux, et être vexés qu’ils aient eu un monologue moins long que celui des tadmorvs violets. D’accord ils avaient tous entendu cinq minutes plus tôt, mais quand même, ils sont moins biens que les autres c’est ça ? Enfin, personne ne se risque à relancer les hostilités, le groupe d’envahisseurs est nombreux et les tadmorvs d’Alola ne peuvent pas se permettre de perdre une miette de ce passage étroit qui est tout ce qui reste d’un territoire autrefois bien plus étendu. Quelques grognements dans l’assistance, et la créature qui fait s’agiter l’eau du canal émerge lentement avec un regard encore suspicieux. Une seule bonne nouvelle dans tout ça, vous pouvez maintenant être à peu près sûrs d’avoir été entendu du dominant de cette colonie, vous avez en face de vous un grotadmorv d’Alola dont les couleurs sont si vives qu’elles en deviennent agressives pour vos rétines. Ses dents ou ce qui en tient lieu ont presque l’air tranchantes, et si cette espèce ne dépasse généralement pas le mètre de hauteur ce spécimen est d’une proportion toute autre. En le voyant, même le grotadmorv lieutenant de ceux venus de Kanto paraît se dire que ce n’était pas une si bonne idée ce commando qu’il dirige à l’attaque.
Si le dominant n’a pas de réaction franche à votre endroit ou après votre discours, qu’il ne réagit pas vraiment aux cris adressés par ses lieutenants qui sortent à leur tour de l’eau boueuse ni à l’adoration que paraissent éprouver les tadmorvs d’Alola rassemblés autour de lui, il ne vous attaque pas ni ne donne d’ordre d’assaut. Ce qui est déjà ça. Il doit même avoir écouté Darell parler d’action groupée et de cette visite aux miamiasmes, puisqu’il finit par grogner sur un grotadmorv de son espèce avec un signe de tête vers les pokémons souvent confondus avec des sacs poubelles par les humains à la surface.
De son côté le miamiasme qui doit être le guide de la bande fait un grand geste de patte pour vous inciter à le suivre, puisque les gestes semblent être un moyen de communication que vous maîtrisez, avant de se retourner pour repartir en sens inverse dans le passage qu’ils ont emprunté à l’aller. La petite troupe de miamiasmes s’élance en bondissant et babillant à la suite de leur chef, dans un ensemble fort peu discret par ailleurs, et chose étonnante le grotadmorv d’Alola sorti des eaux sur ordre de son dominant se place bien au centre de la formation des rangers. Le message est là aussi assez clair, ils les escortent souvent jusque chez eux, les humains en rouge ont intérêt à faire pareil cette fois s’ils ne veulent pas que l’émissaire de la colonie revienne blessé et provoque un incident diplomatique majeur.

Puisque Darell a vigoureusement protesté devant l’idée de se séparer, les rangers s’alignent dans la bonne direction pour suivre ensemble les miamiasmes déjà loin dans leur tunnel en constatant que le chef de votre escouade n’émet pas de suggestion. La ranger au nidorino est cependant la dernière à quitter la tranchée virtuelle entre les deux groupes de tadmorvs, et se retourne fréquemment pendant que vous vous enfoncez dans l’obscurité. Il est vrai que vous venez de laisser des ennemis féroces ensemble sans surveillance, ni garantie de ce qui pourrait se passer pendant votre mission de diplomatie qui a intérêt à être un succès.

Le groupe de rangers encadre avec assiduité le grotadmorv qui a accepté de les suivre dans les souterrains, même s’il obéit plutôt à un ordre de son dominant techniquement. Plus loin dans le tunnel, les miamiasmes sont désormais difficilement visibles parmi les autres ordures et en particulier les sacs poubelle avec lesquels ils peuvent facilement être confondus. Mais leurs pépiements, surtout ceux des plus jeunes qui sont aigus et sans retenue, se répercute fort bien dans la galerie et permet de les repérer même de loin. Cela doit d’ailleurs éloigner les autres pokémons sauvages, car vous n’en croisez pas ou ils n’osent pas se montrer pendant que vous cheminez.
- Vous avez les cadeaux au fait ?
- Oui oui, j’ai ! affirme la ranger qui a repris sa carte en extirpant de ses affaires ce qui ressemble à une maquette de bateau en plastique et un peu abîmée.

L’objet tout étrange qu’il paraît être, ne provoque aucune question de la part des autres professionnels en rouge qui s’y attendaient plutôt si on en croit la réaction de leur chef. Le seul autre homme de l’équipe sort d’ailleurs un robot jouet qui n’a visiblement plus de piles et un oeil en moins. Si son magnéti peut sans doute faire quelque chose pour le pauvre reste inutile, le pokémon acier n’use pas de ses pouvoirs dessus et le robot reste à pendre au bout du bras. Cette fois personne ne pense à vous expliquer tant tout leur paraît normal et quotidien par ailleurs. On explique pas au bout de quinze ans d’un travail de bureau à quoi sert une agrafeuse, même quand on a des visiteurs dans l’entreprise.
Vous finissez par arriver devant un assemblage de tuyaux plus petits qu’une vraie galerie, qui s’enfoncent dans un pan de mur devant votre groupe en laissant de larges ouvertures entre eux. Ces passages sont bien suffisants pour les miamiasmes qui s’éparpillent dans ce parcours artificiel et paraissent descendre encore plus profonds dans les entrailles de la terre, mais pour les humains comme pour le grotadmorv d’Alola impossible d’emprunter le même chemin. Les rangers ouvrent alors une trappe normalement réservée aux agents d’entretien de la ville, dans le sol juste à vos pieds. Une échelle qui n’a que quelques barreaux est la seule chose que vous voyez pour le moment en plus du sol humide.
- On peut passer par là pour rejoindre la colonie, explique la spécialiste du sujet. Mais un seul à la fois. J’y vais !

Aussitôt dit aussitôt fait, la ranger range sa carte et s’engage dans le boyau avant de réceptionner son nidorino qu’on lui tend. Avec les partenaires des rangers, pas de poké ball pour faciliter les déplacements de ce genre, il faut surtout se réjouir que l’ouverture soit assez grande pour lui comme pour le reste des pokémons, y compris le grotadmorv d’Alola dont le corps relativement malléable lui permet de se glisser sans difficulté.
Lorsque tout le monde est arrivé à bon port, l’équipe au complet se retrouve serrée dans un coin d’impasse qui paraît retenir les eaux se déversant depuis tuyaux et galeries avant que tout ne se déverse définitivement dans sa destination, par une dernière sortie énorme fermée par une grille solide. Cette partie de souterrain n’est pas aussi ouverte ni sans doute aussi grande que le territoire des tadmorvs d’Alola que vous avez visité, mais cela laisse largement la place à toute une nuée de miamiasmes et à plusieurs miasmax de s’installer et circuler. Mais surtout, vous comprenez d’un coup l’utilité réelle de cette colonie pour les égouts et la ville par la même occasion : si l’endroit paraît si étroit, c’est qu’il est très encombré de tout un tas d’objets abandonnés par les humains qui n’ont pas été réduits à l’état de déchets ou de liquides. Cette masse est méticuleusement triée, organisée, rangée par les pokémons sacs poubelle partout où ils le peuvent, le long des tuyaux qui leur servent d’étagères de fortune partout sur les parois. Des objets assez gros pour poser problème et boucher des galeries trop étroites à n’en pas douter, mais qui deviennent des trésors pour ces miamiasmes et surtout leur évolution friande de ce genre de matériau pour les corps rebondis.

Tout ce beau monde vaque tranquillement à ses occupations dans la colonie qui prend des allures de fourmilière, jusqu’à votre intrusion qui fait tourner les têtes et provoque un grand silence chez les pokémons qui vont repèrent. Ce silence se répand comme une traînée de poudre parmi les pokémons poisons, moins la petite troupe d’éclaireurs qui revient en piaillant avec de la chance pour raconter comment votre rencontre s’est déroulée. En attendant, c’est un spécimen bien plus gros qui s’approche pesamment de vous, et vous toise de haut en bas avec un grognement inquisiteur. Qui se transforme vite en un grondement plus agressif quand il avise la présence d’un grotadmorv d’Alola qui fait partie de ses ennemis jurés. Ce miasmax est à n’en pas douter le dominant local, et si cette espèce n’a normalement pas les faveurs de la championne Patience celui-ci ne dénoterait pas dans son arène tant il dépasse ses congénères tant en hauteur qu’en largeur. Les rangers se placent vite devant le grotadmorv histoire de dérober à son regard le sujet d’énervement, pendant que la ranger au nidorino vous murmure à toute vitesse les informations qu’elle a glanées à leur sujet.
- C’est une femelle, et si j’ai bien compris c’est aussi la mère de beaucoup des miamiasmes ici. Elle est très protectrice envers ses enfants, il ne faut surtout pas la contrarier. Nous venons en amis ! ajoute-elle en levant la voix pour les miamiasmes. Et nous avons apporté ça pour vous.

Pendant qu’elle termine sa phrase, son collègue et elle-même déposent le bateau accompagné du robot cassé sur le sol. La miasmax dominante se saisit de chaque objet précautionneusement, avant de les renifler délicatement puis de les tendre à deux miamiasmes différents. Chacun d’entre eux repart à petits pas précipités avec son nouveau trésor. Le présent semble avoir assez apaisé, ou au moins intrigué la matriarche, pour qu’elle ne saute pas sur les humains même avec leur invité indésirable. Elle se contente d’un grognement perplexe et encore un peu aigre dans votre direction, pendant que la ranger au nidorino se dépêche de reprendre la parole.
- Personne ne vient vous attaquer, promis ! Il faut que nous discutions.

La dominante est toujours dubitative, mais elle n’a pas encore donné l’ordre à sa horde de vous sauter dessus ce qui est la meilleure nouvelle possible. Parmi la masse des plus petits pokémons sacs poubelle, l’un d’entre eux est resté plus près de vous et les plus attentifs auront sans doute reconnu le leader de l’escouade que vous avez rencontré chez les tadmorvs. Il vous regarde avec des yeux concentrés, et émet un petit cri avec un signe de tête comme s’il attendait quelque chose de vous. Que vous fassiez encore votre discours de tout à l’heure, ou n’importe quoi d’autre.

Darell se contenta d’hocher la tête en voyant les Rangers sortir des jouets ayant connu de meilleurs jours. En effet, rien de tel que des présents pour faire une bonne première impression et au moins s’assurer de l’écoute d’un interlocuteur. Surtout pour une demande d’alliance. Dommage que ce concept basique semble lui être étranger quand il s’agissait de l’appliquer dans les relations humaines…

Sans un mot de sa part, l’analyste environnemental suivit les agents de terrain, son Porygon flottant à hauteur d’épaule. Au moins, celui-ci ne fut pas embêté par le fait de devoir descendre une échelle dont il valait mieux demeurer ignorant quant aux pellicules graisseuses recouvrant les barreaux. Mais maintenant que le Grotadmorv d’Alola, Cyanide et Happiness avaient emprunté le même chemin, ils allaient peut-être devoir penser à prendre des gants ou bien se désinfecter les mains pour le retour.

Etrangement, la puanteur avait diminué jusqu’à paraître supportable quand ils atteignirent l’antre des Miamiasme. Non pas que la grande perche rose s’en plaignait, mais ce fut à peine s’il remarqua ce fait tant il était en admiration devant l’organisation inattendue de ces créatures. Il se serait fait un plaisir d’étudier leur système de rangement pour ensuite essayer de le comparer à ceux de colonies présentes dans d’autres régions, mais ils avaient d’autres Chacripan à fouetter pour le moment. Surtout que leur arrivée n’était pas passée inaperçue… Et que la maîtresse des lieux ne tarda pas à les toiser de toute sa hauteur.
Darell réajusta ses lunettes sur son nez, dans un geste qui aurait tout autant pu être provoqué par la pression dégagée par l’aura redoutable de la Miasmax que par l’aiguisage de son esprit scientifique à l’entente des explications de leurs guides. Maintenant, il se demandait si ces Pokémon avaient un mode de reproduction conventionnel, ou si la naissance d’un des leurs s’effectuait par des moyens détournés, un peu comme les Bacabouh…

Alors qu’il ajoutait cette interrogation à la longue liste des sujets qu’il souhaiterait approfondir plus tard pendant que ses deux Tadmorv se faisaient tout petits derrière lui, les Rangers entamèrent les discussions après avoir fait leur offrande. Aloy prit la suite… Mais le scientifique cligna des yeux devant son intervention. Il ne comprenait pas vraiment pourquoi elle s’exprimait ainsi, surtout quand elle avait parlé normalement à ses propres Pokémon jusqu’à présent. Certes, il s’agissait de créatures sauvages, mais elles étaient douées d’une raison suffisamment importante pour vivre en communauté et développer leur propre système de classement. A moins qu’il ne se fourvoie ? Après tout, il n'était pas très doué pour parler.

Quoi qu’il en soit, Darell acquiesça légèrement lorsque la jeune femme lui proposa d’essayer. Il s’avança d’un pas, non sans que Cyanide et Happiness blêmissent en le voyant s’approcher autant, il ouvrit la bouche :

« Nous savons combien les Rattata vous affectent. Ils vous prennent sans cesse du territoire et des ressources, au point que vous en êtes réduits à vous battre pour des miettes avec les autres colonies de Pokémon Poison. Cependant, en agissant ainsi, vous vous épuisez mutuellement, sans pour autant faire reculer les assauts des Rattata. »

Il marqua une courte pause, essayant de voir si son état des lieux de la situation trouvait faveur auprès de la dominante, avant de reprendre.

« Ce que nous vous proposons, c’est d’effectuer une trêve temporaire avec les Tadmorv et Tadmorv d’Alola, pour que vous regroupiez vos forces pour faire front commun contre les Rattata. Mettez de côté vos différends pendant quelques jours, quelques semaines tout au plus, et reprenez le contrôle des Egouts. Il désigna le Grotadmorv coloré qui les avait accompagnés. Nous avons déjà évoqué cette alliance aux autres colonies, et elles semblent plutôt partantes. Mais avec votre accord, l’impasse dans laquelle vous vous trouvez tous pourrait être résolue d’autant plus rapidement et efficacement. »

Ses deux Tadmorv acquiescèrent avec toute la conviction que leur crainte inspirée par la Miasmax leur permettait, mais ils se firent tout petits dès que la matriarche posa ses yeux sur eux. Ils ne voulaient surtout pas la contrarier.

Les rangers ont beau être des professionnels, dont une spécialiste du type de pokémons qu’on trouve si bas dans les égouts, il n’est pas dur de constater qu’ils sont soulagés que les cadeaux soient acceptés et que l’agressivité ne soit pas trop remontée malgré la présence d’un grotadmorv ennemi. Mais la ranger au nidorino a à peine le temps de souffler avant de se figer de nouveau, en entendant le discours d’Aloy si on peut l’appeler ainsi qui l’avait déjà tellement surprise la première fois. Même avec le support d’un téléphone en plus, pourquoi se contenter de si peu de mots alors qu’elle-même vient de faire de vraies phrases en plus ? La miasmax dominante paraît assez de cet avis, regardant l’humaine blonde d’un air plus abasourdi et méfiant qu’autre chose. Si elle avait eu des sourcils, on pourrait penser qu’elle serait en train de les froncer.
Evidemment l’image des rats ne lui plaît pas trop, il y a fort à parier qu’elle a déjà eu des démêlés avec eux, et il est inutile de lui dire qu’ils sont des ennemis. Cela tout pokémon poison des égouts l’a déjà compris depuis longtemps. La miasmax semble apprécier le concept de famille en revanche, caressant un miamiasme du bout de son appendice au passage. Elle reste dubitative face à l’idée d’une grande famille qu’ils seraient avec les humains, ne voyant pas bien ce que vous avez tous en commun, et encore plus avec les tadmorvs évolués ou non qu’ils ont plutôt l’habitude de combattre par ici. Heureusement que vous aviez un très beau bateau et un très beau robot cassé.

La miasmax paraît sur le point de vous renvoyer, acceptant à peine de ne pas vous broyer ici, quand le discours de Darell plus détaillé retient son attention presque malgré elle. La dominante approuve d’un grognement quand on évoque les conséquences de cette invasion partout dans les galeries souterraines, gronde plus bas peut-être vexée quand on conteste sa manière de garder son territoire y compris des autres espèces empoisonnées, mais ne donne pas encore d’autre ordre pendant la pause du chercheur. Tout au plus les amas indéfinissables qui composent le corps verdâtre s’agitent un peu plus dans l’attente de la fin, et sans doute de votre départ pour laisser la colonie vaquer à sa mission sacrée de collecte des objets humains abandonnés.
L’idée d’une alliance la surprend, c’est indéniable. Elle est encore plus surprise d’apprendre que les autres colonies ont déjà été contactées, et ne paraît pas réussir à croire que tous ont accepté le principe typiquement humain de l’alliance contre un ennemi commun. Il y a un instant de flottement global dans la colonie, le miamiasme qui vous a rencontré le premier semblant très satisfait de son exploit et de vous avoir ramené ici pour que vous exposiez votre idée. Voyant l’approbation toute timide des deux tadmorvs de Darell, la miasmax dominante accepte dans un soupir d’entendre le grotadmorv coloré et l’incite d’un geste de son plus long bras à la rejoindre. Il n’est pas difficile de se rendre compte que tout évolué qu’il soit, ce visiteur en territoire ennemi n’est pas des plus rassuré. La matriarche commence à lui adresser la parole par brefs cris encore cassants, auquel le grotadmorv répond aussi vite et succinctement, jusqu’à ce qu’un bruit sourd fige tous les pokémons. La miasmax dominante en particulier se redresse de toute sa hauteur, les sens en alerte, et son instinct ne la trompe pas.

Avant que les rangers n’aient le temps de s’étonner ou de donner des informations aux civils qui les accompagnent, ce sont plusieurs trappes, passages et grilles qui s’ouvrent soudain comme autant de bouches déversant des rattatas par dizaines ! En un instant le beau musée bien ordonné des miamiasmes se transforme en chaos généralisé, les plus jeunes piaillant de peur en essayant de sauver leurs trésors, la dominante rugissant de rage en constatant cette invasion en règle. Fidèle à son rôle, la matriarche allonge son bras droit et en projette des toxines non identifiées en plein sur une galerie par laquelle arrivent les rongeurs, qui passent immédiatement une très mauvaise journée. Obnubilée par sa tâche elle ne vous remarque même plus, et le grotadmorv d’Alola n’a même pas le temps de revenir jusqu’à vous tant les rattatas sont nombreux et coupent vite chacun du reste du groupe. Partout les combats s’engagent, et si chaque miamiasme a l’air plus fort individuellement qu’un rattata, leur taille induisant peut-être en erreur, les rongeurs violets sont si nombreux que la bataille reste féroce. Surtout que les miamiasmes veulent protéger leur collection en plus d’eux-mêmes, un souci que n’ont pas leurs adversaires qui n’hésitent pas à piétiner tout objet.
Vous êtes encore relativement isolés du champ de bataille pour le moment dans votre coin, mais nul doute que le conflit arrivera très bientôt jusqu’à vous ! Sans compter le grotadmorv d’Alola que les rangers avaient promis de protéger, et qui regarde déjà dans votre direction avec un air courroucé en se battant contre plusieurs ennemis à la fois bien décidés à lui grimper dessus.

Le Rhodesien observait avec grand intérêt la matriarche, tant pour essayer de définir si leurs arguments avaient fait mouche que pour ses recherches personnelles. Après tout, ce n’était pas tous les jours qu’il avait la chance d’être aux premières loges pour étudier les relations entre un leader et sa colonie.
Quoi qu’il en soit, la Miasmax semblait ouverte à l’idée d’entendre l’opinion des autres créatures empoisonnées les accompagnant. Voilà qui allait bien faire avancer les choses !

… Et bien évidemment, ce fut ce moment précis que les rats choisirent pour se déverser par centaines dans l’enclave investie par les sacs poubelle ! En moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, les rongeurs grouillaient tant et si bien qu’ils se mettaient même à essayer d’escalader les monticules de trésor et les Pokémon.

« Non, une Aurore ne servira à rien ici, lâcha le scientifique en serrant les dents. Les tas d’objets vont bloquer la lumière, et les Rattata sont de toutes façons trop nombreux pour que ça les affecte tous. Sans compter que, contrairement aux Tadmorv de tout à l’heure, eux ont l’habitude de se rendre en surface.  Pire, vu la panique dans laquelle se trouve la matriarche, je doute qu’elle entende notre avertissement à temps. De plus, il m’est impossible de sortir Griotte : ils risquent d'être tout de suite attirés par son odeur et de s’en prendre à lui puis à moi. »

Le visage crispé malgré son stoïcisme habituel, Darell fixait le pauvre Grotadmorv submergé par les envahisseurs. Il réfléchissait à toute vitesse à une solution, même temporaire, pour y voir un peu plus clair dans tout ce chaos. Switch était à écarter. L’assistant numérique venait tout juste d’être créé, et même s’il apprenait vite il n’avait bien évidemment pas pu lui installer le moindre module offensif. Cyanide et Happiness ? Ils étaient parmi les plus faibles des Tadmorv, la raison pour laquelle chaque colonie avait accepté de s’en séparer. Non, la seule qui puisse vraiment être un tantinet efficace…
La grande perche rose porta ses doigts à la capsule de sa petite chipie. Oui, elle pouvait faire de gros dégâts dans les rangs des rats. Mais passé l’effet de surprise, est-ce qu’ils ne risquaient pas de s’en prendre aussi à elle ? Certes, elle faisait deux, trois fois leur taille. Mais vu leur nombre… Non, il était essentiel qu’elle ait du soutien. Sans ça, la petite ourse rose ne ferait pas long feu.

Comme il tournait la tête vers le reste du groupe, son œil aguerri fut attiré par la Tylton d’Aloy. Une pensée traversa son esprit.

« Aloy, peux-tu relancer une Rune Protect ? »

Dès que le voile éthéré recouvrit tous les alliés, il enchaîna d’une voix ferme :

« Happiness, Gaz Toxik ! »

Surprise, l’amas de pollution jeta un œil incrédule à son humain. Mais devant son air assuré, elle se dit qu’il devait savoir ce qu’il faisait… Aussi, inspirant un grand coup, elle cracha une haleine poisseuse et nauséabonde, qui se répandit lentement mais sûrement dans l’enclave. Si les habitants des lieux ne craignaient rien grâce à leur type et que le groupe était protégé des toxines par la barrière purifiante, les Rattata, eux, allaient devoir respirer cet air vicié.

Mais Darell n’en resta pas là. Saisissant une capsule à sa ceinture, il la lança. Comme elle se matérialisait, la Nounourson poussa un couinement impatient comme elle s’ébrouait en dispersant les particules illuminées accrochées dans sa fourrure. Elle pencha son adorable bouille sur le côté en découvrant les rats par centaines.

« Pimprenelle ! s’écria l’analyste environnemental en mettant ses mains en porte-voix. Frappe les Rattata autant que tu veux mais laisse les autres tranquille ! »

Des étoiles illuminèrent les pupilles sombres de la peluche sur pattes. Quoi ? Elle pouvait taper ? Et même pas qu’elle se ferait gronder pour ça ? Vrai de vrai ?!
Dans un couinement réjoui, l’adorable chipie se précipita sur les rongeurs en agitant ses redoutables pattounes dans un festival de Centrifugifle et de Forte-Paume. C’est qu’elle y mettait du cœur à l’ouvrage !

Le plan ou l’ébauche de plan étant mis en pratique dans la foulée, on peut parler sans exagération de panique générale. L’impression est évidemment renforcée par les miamiasmes pour la plupart très jeunes qui sont essentiellement occupés à courir en criant et en essayant de sauver leurs trésors, bien que certains peut-être plus âgés essaient de s’organiser autour de leur mère pour repousser la horde d’envahisseurs. Cette dernière les encourage de son mieux tout en continuant de répandre des toxines particulièrement efficaces depuis son plus long bras, ayant totalement oublié la présence du groupe d’humains et du grotadmorv qui les visite. L’un d’entre vous, s’il est particulièrement attentif, peut remarquer que l’un des miamiasmes qui a décidé de combattre doit être le meneur de la troupe qui vous a introduit en ce lieu.
Mais il y a fort à parier que personne n’a noté ce genre de choses, chez les rangers en tout cas tout le monde est trop occupé à s’organiser pour la bataille, exactement comme les civils par ailleurs. Si le nidorino, tout en étant investi dans la mêlée, n’est pas un atout décisif vu les forces en présence, il tient bien le poste avec les divers pokémons d’Aloy qui vous protègent de tout rat voulant s’approcher. Entre les crocs givrés, les flammes, les éclairs et les dards empoisonnés, les rats violets apprennent vite à ne plus s’approcher. Votre groupe reste donc à l’écart du conflit principal qui se concentre sur les pokémons poison et leur matriarche.

Le ranger en charge de l’expédition, seul à ne pas avoir montré le moindre partenaire jusque là, se saisit alors d’une sphère et en fait jaillir un curieux chat gris, aux griffes acérées et à la barbe fournie. C’est à ce moment que vous apprenez que le chef ranger est un dresseur, sans doute le seul de son escouade, et on peut presque supposer qu’il vient de Galar en voyant son berserkatt qui paraît tout à fait prêt à en découdre.
- Je l’avais pris avec nous pour les pokémons poisons, mais il devrait bien s’en sortir ici aussi !

La suite lui donne immédiatement raison, quand le chat bondit dans la mêlée au milieu de ce qui reste ses proies privilégiées, coude à coude avec Pimprenelle pour distribuer coups de griffes et autres civilités de coutume dans un combat pareil. Son type acier le protège efficacement des rats qui ne peuvent percer la peau trop solide, quant à la nounourson encore faudrait-il résister assez longtemps à sa force très peu contrôlée pour répliquer. Le chat à barbe parvient peu à peu à se frayer un chemin jusqu’au grotadmorv coloré pour essayer de le sortir de là, sur instructions de son dresseur qui le guide comme il peut en essayant de dominer le bruit de la mêlée.
Lorsque la plupart des rattatas ont été délogés du corps multicolore et gluant, c’est la ranger au lewsor qui rentre en scène. Le pokémon psychique, qui profite de la protection offerte par la Rune Protect et l’armée miniature de pokémons en barrage devant le groupe pour se concentrer, fait léviter le grotadmorv de ses pouvoirs mentaux pour le ramener vers vous. Les derniers rattatas accrochés tombent pendant le voyage, que le pokémon poison ne semble pas non plus particulièrement apprécier par ailleurs. Il a même l’air un peu vaseux quand il atterrit enfin sur le sol derrière les rangers et que l’aura psychique le lâche.
- Désolée, on a fait au plus vite pour te sortir de là !

Grognement du concerné en guise de réponse, pendant que le berserkatt repart à l’assaut histoire de ne pas se faire distancer par la nounourson. Les rattatas se cassent aussi les dents sur le magnéti du dernier ranger, dont l’acier est tout aussi impénétrable mais qui réplique en plus d’éclairs déplaisants dès qu’on a le malheur de lui grimper dessus. Entre le magnéti et le dynavolt d’Aloy qui n’est pas en reste, l’électricité devient paradoxalement le principal problème des rattatas, surtout ceux à la fourrure trempée par les égouts. Pour les autres, le gaz libéré par le tadmorv de Darell est une autre contrariété forte, qui pousse certains d’entre eux à fuir par où ils sont venus. Le problème est que le flot de nouveaux ennemis ne se tarit pas encore, et les rattatas qui arrivent ne savent pas encore quelles difficultés les attendent ce qui explique leur détermination. En restant dans votre coin vous êtes relativement protégés, mais l’assaut ne faiblit pas et le chef d’escouade suggère finalement qu’il va falloir s’engager plus avant pour espérer régler la situation. En ça le berserkatt et Pimprenelle ont précédé sa volonté, partis devant comme ils l’ont fait. La matriarche miasmax semble parvenir à endiguer une partie du flot, jusqu’à ce que des rattatacs bien évolués et autrement plus retors ne se joignent au flot des plus petits. Les pokémons à la fourrure sable drue et aux dents longues craignent moins les toxines, ou semblent y résister plus longtemps, sont un peu plus gros qu’un miamiasme moyen, et s’ils sont bien moins nombreux que les rattatas ils sèment de nouveau l’affolement dans les rangs des pokémons poison. La miasmax dominante commence vraiment à en avoir assez, et elle produit finalement une sorte de hurlement très grave et bas, qui se répercute dans les tuyaux alentour et doit se répandre très loin dans les galeries des égouts. Une partie des combattants se figent à l’écoute de ce son, qui n’augure rien de bon pour les rongeurs même si vous n’en voyez pas encore la conséquence. Puis le combat reprend de plus belle.

Dernière édition par Le Conseil le Lun 24 Mai - 15:02, édité 1 fois

Tout semblait se passer relativement bien pour le groupe des humains, ou en tout cas de leurs pokémons combattants puisque d’autres les couvraient et les isolaient pour le moment de la mêlée. Ni le berserkatt ni la nounourson ne ménageaient leur peine, et le nidorino au moins qui donnait de plus en plus de coups de corne s’avançait aussi peu à peu pour se joindre au combat. Du côté des rats violets donc les plus jeunes, on ne s’attendait visiblement pas à une telle résistance. Surtout qu’ils étaient tout de même venus nombreux, ce qui expliquait d’ailleurs la longueur de ce combat. Autrement les rangers combinés aux civils, mais surtout la férocité froide de la miasmax dominante des lieux auraient déjà réglé la question.
L’arrivée des rattatacs, tâches incongrues tant elles étaient claires dans ce paysage en clair-obscur perpétuel, changea encore l’équilibre fragile des forces. L’entrée en scène de la ponyta de Galar ne fut certes pas de trop bien que Pimprenelle se débrouille assez bien avec sa colère démultipliée, pour les deux autres pokémons il fallut vite unir les forces et le berserkatt se retrouva vite à devoir grimper sur la croupe de la ponyta pour y distribuer ses coups de griffes de plus haut pendant que l’équidé faisait de même à grands coups de sabots. La stratégie avait une chance de fonctionner tant que les rongeurs ne submergeaient pas le petit cheval.

Le magnéti qui se faisait grignoter par les rattatas commençait à en avoir assez, malgré le fait que les crocs ne risquaient pas de faire grand-chose sur son métal. Le poison libéré en continu par un tadmorv de l’équipe sembla lui donner une idée, en bon partenaire ranger il avait l’habitude de combiner les forces et comptait bien essayer encore une fois. Du corps de machine jaillit soudain une série d’étincelles, qui vinrent d’abord s’attacher aux particules du gaz toxik en suspension dans l’air qui se chargea soudainement d’électricité en plus d’être empoisonné. Ce n’était déjà pas une bonne nouvelle pour les rats avant, mais alors avec un résultat si explosif il y eut soudain un grand vide devant le groupe des humains et leur ligne de défenseurs, presque jusqu’à la matriarche prise d’assaut par plusieurs rongeurs qui devaient l’avoir choisi pour cible avant de lancer l’assaut.
- Il va sans doute falloir avancer, on est pas assez utiles pour changer la donne ici !

L’analyse du chef ranger était exacte sur le fond, bien qu’elle comporte plus de risques pour vous-mêmes. Mais dans votre coin impossible de venir en aide aux miamiasmes qui eux n’en menaient pas large. Leur dirigeante était un peu trop occupée pour les secourir, surtout tous à la fois, et si certains savaient à peu près se battre d’autres semblaient plutôt céder à la panique. Vous pouviez en voir deux ou trois dans un coin du labyrinthe de tuyaux, serrant une pauvre babiole contre eux en tentant de la sauver, d’autres pleurant à chaudes larmes en courant aléatoirement pour échapper à un rattata affamé. Un miamiasme avait déjà été attrapé par deux rats violets et couinait de douleur, pendant que chaque rattata tirait d’un côté en déformant son corps de déchets. Décidément, arrêter le combat ou sauver les miamiasmes semblait de plus en plus urgent.
Il n’y aura peut-être plus longtemps à tenir néanmoins, parce que l’appel furieux de la miasmax dominante portait ses fruits. En réponse au cri rauque qui s’était répercuté dans les galeries, des bruits pesants se rapprochait lentement de votre position. Vous voyez peu à peu apparaître les têtes, un bout du corps, un long bras de nouveaux pokémons évolués. Apparemment certains enfants de la matriarche avaient bien grandi, à moins qu’elle n’ait plusieurs partenaires de reproduction ce qui n’était pas impossible et surtout les deux hypothèses ne se contredisaient pas mutuellement. En tout cas l’atmosphère fut soudain un peu plus étouffante avec l’arrivée de ces nouveaux miasmax, et la salle qui pourtant semblait si grande à votre arrivée parut se rétrécir tant les grands corps prenaient de place. Le flot intarissable de rongeurs devait se sentir presque à l’étroit maintenant, et même les rattatacs n’en menaient plus si large.

Le grotadmorv d’Alola encore gardé par le lewsor de la dernière ranger émit un grognement d’avertissement, avant que nous sentiez la présence pesante d’un de ces miasmax derrière vous. Il était si massif, en bon représentant de son espèce, qu’on pouvait se demander comment il avait réussi à emprunter le même chemin. Pour l’instant il vous regardait d’un air pressé en grondant d’impatience, allez les jeunes on avance il y a une invasion à gérer là !
Que vous le vouliez ou non vous voilà poussés bien plus près du centre de la salle, et vous auriez tout intérêt à vous organiser rapidement car la ligne de défense ne couvrait désormais qu’un seul côté. Seul point positif, vous voilà plus près de la nounourson et de la ponyta de Galar sur laquelle le félin issu de la même région était monté.

Aussi chaotique qu’était la situation, elle aurait pu être bien pire. Leur première ligne tenait bon et faisait des ravages dans les rangs ennemis. Même si l’apparition des rats dodus corsait les choses…

Darell grimaça en entendant la remarque du Ranger. Il était loin d’avoir tort, mais il appréhendait la réaction des Rattata s’ils les voyaient bouger franchement. Cependant, ils devaient bien secourir les Miamiasme affolés… Dans ce cas, autant minimiser les risques autant que possible.

« Aloy, assure-toi que la Rune Protect soit renouvelée dès que tu vois qu’elle faiblit. Hapiness, dirige ton Gaz Toxik par-là ! »

Il avait désigné le vide généré par les étincelles explosives du Magnéti. L’amas de pollution vert s’exécuta aussitôt. Vu que les rats avaient dû commencer à associer cette odeur à de mauvaises choses, cela allait au moins leur fournir un couloir à peu près sûr pour rejoindre leurs alliés.

« Si on les rappelle, les Rattata et Rattatac vont s’engouffrer dans cette brèche et on aura perdu le peu de terrain gagné. Ils vont devoir tenir jusqu’à ce que les renforts arrivent. »

Il ne croyait pas si bien dire. Alors qu’ils s’apprêtaient à emprunter le passage nocif, une odeur pestilentielle envahit le champ de bataille. Un concentré putride, pire que les effluves déjà émises par les habitants du musée de bric à brac, qui provoqua hauts-le-cœur et quinte de toux au scientifique. Les yeux agressés au point d’avoir des larmes se former au coin, il se retourna en sentant une présence imposante derrière eux. Ah. Un Miasmax. Certes, il était plus petit que la matriarche, mais tout de même ! Et il n’avait pas l’air commode. Ils feraient mieux de se dépêcher de dégager le passage s’ils ne voulaient pas se faire rouler dessus.
Les dents serrées et essayant de contenir les plaintes de sa gorge agressée, le Rhodesien s’engagea dans le couloir formé par leurs actions précédentes pour rejoindre la Miasmax.

De son côté, Pimprenelle commençait à fatiguer. C’est que c’était rigolo de tout taper, mais ça commençait à devenir lassant… Puis, même que les rats, ils jouaient plus le jeu.
Ses coups de pattounes se faisaient plus lents et prévisibles à mesure que le temps passait… Jusqu’à ce qu’elle finisse par s’asseoir sur son popotin, langue tirée, en poussant une plainte gémissante accompagnée d’un Regard Touchant qui ne risquait pas de laisser de marbre ses assaillants… Mais qui ne les duperait pas éternellement.

Malgré le vacarme du combat, Darell reconnut aussitôt le couinement de sa petite ourse rose. Il se retourna et devint blême en la voyant ainsi, complètement sans défense et encerclée par des rats parfois plus gros qu’elle.

« PIMPRENELLE ! » Hurla-t-il, désespéré.

Tant pis. Malgré ce qu’il avait dit à Aloy un peu plus tôt, il n’avait pas le choix que de la faire rentrer dans sa capsule. Ses doigts fébriles arrachèrent presque la Poké Ball à sa ceinture comme il la dirigeait vers elle. Pourvu qu’il ne lui arrive rien le temps que le rayon rouge ne l’avale !

Que vous le vouliez ou non vous voici à présent plus proches du centre de la salle, et le miasmax dans votre dos pouvait s’en donner à coeur joie. Imitant sa mère, très grande soeur ou compagne c’était dur à déterminer, le nouveau venu commença à asperger les colonnes de rattatas qui n’étaient pas encore au contact de miamiasmes. S’il avait l’avantage de protéger efficacement l’un de vos flancs, il valait mieux ne pas mettre le pied dans la flaque de toxines qu’il formait à chaque attaque, cela même les Rune Protect de la tylton ne pourraient vous en protéger.
Même si vous aviez voulu rappeler vos pokémons les plus avancés, cela aurait été bien difficile, il y avait désormais tant d’ennemis entre eux et vous que passer leur réseau serré était devenu un jeu d’équilibriste. Le magnéti,  sur invitation de son ranger, reproduisait aussi souvent que possible sa tactique de charger d’électricité le gaz toxique du tadmorv de Darell, ce qui laissait toujours de grands trous dans la foule qui continuait de tenter des assauts, mais il ne pouvait le faire trop souvent au risque de toucher également les humains et leurs alliés.

Le grotadmorv d’Alola paraissait encore un peu secoué, et sans doute mal à l’aise de se retrouver dans l’antre d’ennemis séculaires, mais ses grognements de plus en plus fréquents laissaient penser qu’il se jetterait bientôt dans la mêlée à son tour. Le nidorino continuait de lancer sa corne en avant aléatoirement pour repousser les rattatas trop entreprenants et surtout leur forme évoluée qui voulait parfois s’en prendre directement à vous. Quant au lewsor, inspiré par son succès précédent avec un pokémon d’une certaine taille, se mit à faire léviter des miamiasmes victimes de leurs assaillants pour les guider jusqu’à l’intérieur de votre cercle, et les y déposer. Tous ont le même air un peu vaseux que le premier passager involontaire du pokémon psy, sans doute étonnés de se retrouver d’un coup au milieu des humains. Les rangers justement s’empressèrent de veiller à la sécurité des petits pokémons sans défense ou presque, transformant votre groupe en équipe de protection.
- Tout ça ne devrait plus être très long, analysa le chef de l’escouade avec un brin d’optimisme.

Si son idée n’était pas inexacte en soi, il était en effet assez évident que les assaillants faiblissaient et que de moins en moins de rongeurs arrivaient, ces derniers n’allaient pas repartir si facilement. Il restait difficile de savoir s’il y avait une réelle organisation à cet assaut, et qui tenait place de hiérarchie pour tous les autres, mais ils paraissaient collectivement furieux de ne pas réussir à atteindre leur but. La matriarche était un tout petit peu plus calme, et ce fut à ce moment que les rongeurs redoublèrent d’ardeur ; s’ils étaient forcés de partir, ce ne serait pas en silence ni douceur.
Ce fut d’abord le nidorino partenaire d’une ranger qui en fit les frais, en s’avançant trop dans la pièce il se retrouva isolé du groupe et immédiatement encerclé par les rats. Le berserkatt se retrouva presque débordé sur le dos de la ponyta de Galar pratiquement ensevelie tant il y avait de rattatas montés à l’assaut de la robe blanche. Le magnéti dut s’allier à un miamiasme débordé dans un affrontement contre un rattatac coriace, ce qui fit disparaître ses étincelles dans le poison du tadmorv de Darell. Du côté de la colonne de pokémons d’Aloy déterminés à vous défendre, le caninos fut aussi pris à parti, mordu à une patte par un rattata hargneux et attaqué dans la foulée par trois autres à la fois qui voulaient profiter de l’ouverture.
En ce qui concernait Pimprenelle, si le rayon rouge fonctionna bien comme il était prévu, un dernier rongeur eut le temps de l’attaquer par-derrière et eut la mauvaise idée de toucher à son étiquette. Tout le monde connaissant les nounoursons le savait, il valait mieux ne pas toucher à l’étiquette.

Alors que Pimprenelle poussait ses gémissements plaintifs et, elle devait bien l’avouer, n’était pas trop mécontente d’entendre que son humain allait la ramener dans le calme de sa capsule -non parce que les rats, ben même qu’ils sont pas drôles… Elle sentit une pression à un endroit bien particulier de son corps. Son étiquette. L’un de ces malotrus avait osé s’en prendre à son étiquette !
La Nounourson entra dans une colère noire, qui fit ricocher le rayon protecteur sur son pelage. La petite boule de poils poussa un cri furieux, et abattit ses pattounes à droite, à gauche, dans une furie destructrice qui n’avait plus rien à voir avec le jeu quelques minutes plus tôt. Toute trace de fatigue semblait s’être évanouie, au moins le temps que durerait sa crise.

Mais son soudain regain d’énergie ne rassurait pas le Rhodesien. Il grimaça en serrant les dents en la voyant reprendre son massacre, mais conserva sa capsule entre ses doigts. Bon, dès qu’elle se serait un peu calmée, il la rappellerait pour de bon, cette fois. Parce que là, c’était un coup à ce qu’elle se blesse salement.
Cependant, Pimprenelle n’était pas la seule qui fatiguait. En effet, Darell remarqua que le flux de gaz nocif semblait se tarir peu à peu… Il en comprit vite la raison en baissant les yeux. La Tadmorv d’Alola semblait partiellement dégonflée. Et pour cause : ses réserves de toxines étaient sévèrement entamées à force de relâcher son poison en continu depuis le début de l’assaut.

« Happiness, ne te rends pas malade. Si tu sens que tu atteins tes limites, n’en fais pas trop. »

L’amas de pollution vert lui lança un regard incrédule. Ce… C’est vrai ? Elle pouvait arrêter ? Il lui en voudrait pas ?
Après quelques secondes d’hésitations, Happiness finit par refermer sa bouche et déglutir, avant de se mettre à haleter. Ouf… Elle n’en pouvait plus…

Mais avec tout ça, les options de Darell s’épuisaient. Il n’avait plus aucun atout à jouer de son côté, même pour venir en aide aux Rangers. Heureusement, Aloy semblait mieux lottie que lui.

L’analyse d’Aloy concernant le nidorino n’était pas fausse, malheureusement il y eut aussi trop rapidement bien d’autres problèmes à régler. Le premier et non le moindre étant l’épuisement de tous les alliés qui s’installait rapidement, face à une telle vague continue d’ennemis qui étaient tout de suite remplacés par des recrues plus fraîches. Plusieurs miamiasmes mis à l’abri par le lewsor au milieu des humains avaient tout simplement fondu en larmes, certains tenant encore les reliques d’un objet dont ils s’occupaient avant l’attaque. Mais il fallait reconnaître à l’inverse, que les miasmax menés par leur dirigeante étaient d’une efficacité redoutable, surtout que plus la dominante s’énervait plus elle gagnait en férocité. Chose plus importante, comme le chef d’escouade l’avait anticipé le flot des rongeurs s’était peu à peu arrêté ; il ne pouvait pas être infini après tout.

Le magnéti qui combattait aux côtés d’un miamiasme eut finalement le temps pour souffler et recharger ses batteries, le nidorino parvint à franchir le barrage des rattatas pour rejoindre sa ranger blême d’inquiétude l’instant d’avant, le lewsor n’eut bientôt presque plus de pokémons sauvages à mettre à l’abri. Il fallait dire qu’au centre de votre cercle, vous aviez maintenant une belle collection de petits sacs poubelle vivants. L’intervention des nouveaux combattants d’Aloy, aussi surprenant qu’ait été son duo aérien, avait été profitable non seulement au nidorina mais encore au berserkatt qui avait pu reprendre le contrôle de la situation sur la ponyta de Galar fatiguée. En y ajoutant le retour en force de la nounourson déchaînée, dont les coups faisaient facilement voler les rats trop proches, votre groupe fut enfin entouré d’un grand vide.
Une des rangers essaya de retenir Aloy qui semblait avoir décidé de se battre à mains nues, un effort louable pour veiller sur ses pokémons mais qui pouvait vite être bien trop dangereux face à des pokémons. Même aussi petits que des rattatas. La professionnelle en rouge n’eut pas à lutter bien longtemps heureusement, le rongeur qui s’en était pris au caninos lâcha sa prise et fit comme beaucoup d’autres : il battit en retraite après avoir constaté les dégâts dans les rangs. Les rattatacs furent les plus longs à se rendre, mais ils durent aussi abandonner la partie peut-être plus dure que prévue par leur colonie et le dernier finit par disparaître dans une des galeries en crachant de rage.

Après le fracas de la bataille, un silence relatif vous retomba dessus comme un couperet. Relatif parce que les miamiasmes plus petits étaient encore sous le choc, et que les plus grands qui avaient participé au combat se congratulaient pour cette victoire. Les pokémons sauvages qui avaient été mis à l’abri dans votre cercle se répandirent en nuée pour aller rejoindre leur mère occupée à tout compter, ou se lamenter sur leurs trésors perdus. La matriarche s’attarda aussi sur le grotadmorv d’Alola, qui lui rendit bien son regard avec autant de surprise. Ils venaient de se battre contre un ennemi commun, et cela semblait les perturber grandement tous les deux.
- Personne n’est blessé ?

Les autres rangers étaient déjà occupés à vérifier comment allaient leur partenaire respectif, qui avaient chacun donné beaucoup dans cet affrontement. Le lewsor semblait avoir mal à la tête, le magnéti n’aurait rien contre une bonne source électrique pour recharger ses batteries, le berserkatt revenait en traînant un peu la patte après tous ses efforts, et le nidorino léchait ses plaies. Dans l’équipe d’Aloy c’était l’épuisement général pour les pokémons ayant usé le plus de capacités et sortis se battre depuis longtemps, le duo volant s’en sortant sans doute un peu mieux de ce point de vue. Pimprenelle la nounourson avait pu être rappelée après sa crise et risquait de ne plus sortir avant un bon moment ou une séance de soins complète, quand la tadmorv était totalement à court de gaz.
Il était aussi en train de s’installer une sorte de flottement entre tout le monde, alors que personne n’osait reprendre la parole et sans doute ne savait vraiment quoi faire ensuite.