Pourquoi...? Qu’est-ce que je fais de mal avec ces œufs ? Je poussais un long soupire en décrivant du regard la surface lisse et surtout immobile des deux œufs que j’avais récupéré au cours de la foire d’hiver de l’an passé. Ça va faire presque un an… un an… Est-ce qu’ils ont froids ? Trop chaud ? Est-ce que je ne leur donne pas assez d’intention ? Est-ce qu’ils m’en veulent de quelque chose… ? Je me monte la tête… Ce ne sont que des bébés après tout, est ce qu’ils sont capables de ressentir de telles choses ? Pour le savoir il faudrait qu’ils sortent de leur coquille…
J’étais arrivée ce matin au Refuge, voulant apporter des jouets que j’avais acheté quelques jours plus tôt à tous ces petits pensionnaires. Des balles, des brosses, des trucs à plumes, des trucs qui bougent tout seul quand on les active. Avec l’hiver qui approche, les plus fragiles d’entre eux seront forcés de rester bien au chaud à l’intérieur du bâtiment et se retrouveraient beaucoup moins stimulé de nouvelles choses. Espérons que ça leur fera au moins passer le temps plus vite ! Avant de venir, j’avais également récupéré mes deux œufs que j’avais du laissé au PC afin de partir en mission l’esprit tranquille. Mais les voir, immobiles depuis des mois et des mois nourrissait ma peur.
Finalement, las de rester assise devant l’incubateur silencieux et d’attendre un miracle qui n’arrivera sûrement que bien plus tard, je me levais et décidais de tenir mon esprit occupé et loin de toute cette négativité qui me gagnait aujourd’hui. La fatigue que j’accumulais ne devais certainement pas aider, m’enfermer dans un cercle vicieux dont je n’arrivais pas à me sortir. En me levant, je fis craquer mon dos qui s’était endoloris et je me dirigeais vers le comptoir d’accueil ou m’attendais une petite note des choses que Kim et Perry m’avais laissé avant de prendre leur matinée. Il fallait faire un grand ménage de l’espace intérieur chauffé, remplir les abreuvoirs d’eau, commander de la nourriture, récupérer les saletés qui flottaient dans le bassin… Eh bien, moi qui m’inquiétais d’avoir le temps de me plaindre. Je décidais d’un parcours à tenir pour accomplir toutes ces tâches dans le moins de temps possible avant de sortir pour m’atteler à la tâche.
J’allais récupérer la perche et le filet qui me permettait de récupérer les feuilles et branches qui avaient terminés leurs courses dans le large bassin. Casse-Noisette me salua depuis le fond en formant à la surface une ribambelle de bulles qui commençait à former une fine pellicule d’écume Je lui adressais un petit signe affectif avant de commencer la seconde tache de ma liste, le remplissage des abreuvoirs ! Pendant que j’allais chercher le jet d’eau, je sentis que quelque chose me retenait par mon T-shirt, une sensation que je commençais à bien connaître !
« Oh, te voilà toi ? Comment vas-tu aujourd’hui ? »
Le Nanmeouie poussa un petit cri, enjoué, tout en oscillant d’un pied à l’autre comme pour marquer de l’impatience. Je ne connaissais pas l’origine de cette hâte qui l’animais mais comme il ne semblait pas me mener quelque pars comme à son habitude, je lui caressais le haut de la tête avant de reprendre ma route vers le tuyau. Le Pokémon me dépassa dans une course pour se saisir du morceau de plastique avant moi. Maladroit, il emmêla ses petits pieds potelés dans le long tuyau et se retrouvait rapidement à terre. Cela ne le découragea pas le moins du monde et il se remis sur ses petites pattes pour se remettre à tirer sur tuyau de toute ses forces. Attendrie par cette vision, il large sourire illumina mon visage.
« Merci c’est gentil ! Attends, je vais t’aider »
Aider par mon petit compagnon, je finis rapidement ma tâche puis nous passions tous les deux à la suivante qui était le grand nettoyage des espaces intérieurs. Pendant que je passais la serpillère, le Nanméouie s’arrêta de courir dans tous les sens pour me regarder avec des yeux soudain graves. Prise de panique je m’arrêtais, lâchant ma serpillère qui frappa lourdement le sol.
« Qu-quoi ? Quelque chose ne va pas… ? »
Le Pokémon rose se mis à courir vers moi et tira de toutes ses forces mon T-Shirt en me pointant la porte qui menait à l’accueil. L’inquiétude montait en mois et je suivis le Nanméouie rapidement, manquant de trébucher dans ses petites pattes potelées. Finalement, nous arrivions devant les œufs, maintenus au chaud dans leurs incubateurs. Il me montrait celui à la surface brune et verte, le plus solide des deux. Je cru dans un premier temps qu’il y avait un problème, que l’œuf n’allait pas bien, avant de voir sa surface vibrer et se fissurer…
Tout était noir autour de lui... Il n'aimait pas cela. Il préférait quand il sentait la douce présence réconfortante qu'il avait l'habitude de ressentir. Cela le calmait. Mais là, il n'y avait rien, il ne ressentait rien et il ne voyait rien. Commençant à avoir peur, il se secouait dans tous les sens, il donnait tout ce qu'il avait pour sortir de sa prison et se sentir enfin en sécurité. Sa prison résistait, il avait envie d'abandonner et de pleurer, mais il se donnait à fond pour parvenir à ses fins et après avoir entendu quelques craquements et redoubler d'efforts...
Il sortit enfin ! La lumière irradiait ses yeux humides un moment avant qu'il puisse discerner une silhouette. Et il le sentit ! C'était elle la présence rassurante. Pleurant toutes les larmes de son corps, Manzaï se jeta sur toi voulant être réconforté au plus vite. Attention, il est lourd...
Je m’agenouillais, devant l’épaisse coquille de l’œuf qui se fissurais dans des craquements sonores perceptibles au travers de la paroi de l’incubateur. L’incubateur ! A la hâte, j’ouvrais la petite porte en verre laissant s’échapper la douce chaleur de l’enceinte. Au fond de moi, une peur irrationnelle faisait pression dans ma poitrine, et s’il n’allait pas bien ? Et si ce n’était pas une éclosion mais une véritable fissure ? Et si le bébé qui allait en sortir me… je m’arrêtais. Le Nanméouie s’était approché de moi et avait étendue l’antenne qui partait de son oreille jusqu’à mon front. J’entendais maintenant résonner dans ma tête une douce petite musique qui réussissais à apaiser tous les muscles de mon corps. Une vague de bien-être m’envahis et toutes mes angoisses disparaissait au rythme de ce carillon. C’était le moment que j’avais tant attendue depuis presque toute l’année qui venais de s’écouler. Pourquoi est ce que je me mettais à douter maintenant ? J’échangeais un regard de gratitude à la créature rose qui avait veillé sur moi depuis tout ce temps, puis j’avançais une main timide de la paroi de l’œuf.
Au moment de mon contact, un morceau important de la coquille vola dans ma direction, me forçant à reculer ma main à la hâte. Au travers du trou qui s’était formé, j’aperçue 3 petites boules vertes, qui s’agitaient nerveusement. Rapidement, un nouveau morceau de coquille se fis propulser pour laisser apparaitre un petit œil jaune, humidifié de larmes. Avant que je n’aie eu le temps de réagir, la petite créature se propulsa de sa coquille pour sauter directement dans mes bras, me faisant basculer en arrière. Outch ! Allongé au sol sur le dos, je repliais mes bras autours de la petite créature tremblante qui pleurais contre mon ventre.
« Eh, bonjour, bienvenue chez toi »
Des larmes de joies perlaient dans le coin de mes yeux et je les avalais pour rassurer le petit Manzai inconsolable. Les minutes passèrent et finalement, le petit arbre de pierre se calma de ses émotions et émis des gargouillis de fatigue. Doucement, je me relevais pour m’assoir par terre et échangea un large sourire avec le Nanémouie qui s’activait dans tous les sens comme pour annoncer la bonne nouvelle à tous le Refuge.
« Je vais te faire visiter tout le Refuge ! Il y a plein de nouveaux amis ici ! Cet après-midi je doit partir en mission, tu ne pourras pas venir avec moi mais ce soir je t’emmènerais voir les gens avec qui je vis, le camp de base, il faudra aussi qu’on se balade dans les étendues vertes, autour du lac ! Il vaudra que je te présente à Valor et à… Shanna ! Il faudrait peut-être que je me calme, je vais réussir à te faire peur comme ça… »
Les minutes passèrent et je ne me rendis pas compte de l’heure qu’il était lorsque je sortie mon téléphone. Mince ! Je vais encore être en retard ! Le Manzai toujours dans les bras, je courrais vers mon sac pour en saisir une Pokeball et la lui présentait.
« Il va falloir que tu attendes mon retour là-dedans, tu seras toujours avec moi mais tu pourras être en sécurité dans cette petite boule, ça te va ? »
Sur ces mots, j’activais la Pokeball et le petit arbre disparu dans un petit cri de joie. Soigneusement, j’accrochait la Pokeball à ma ceinture avec le reste des mes Pokémons et rassemblais mes affaires que j’avais entassées derrière le comptoir d’accueil pour me préparer à partir. Mais alors que je vérifiais que je n’avais rien oublié, le Nanméouie vint se planter devant moi, l’air hésitant, trifouillant ses mains avec impatiences, comme tout à l’heure.
« Oh, Est-ce que tu tout vas bien ? »
Je m’accroupie à son niveau pour lui caresser le sommet de la tête et, d’un petit doigt hésitant, il m’indiqua la porte de sortie. Je ne compris pas tout de suite et tenta de suivre la direction de son doigt pour voir ce qu’il me montrait mais il secoua la tête avec hâte pour recommencer ses explications. Il nous pointa tous les deux à tour de rôle, avant de montrer à nouveau la porte qui menais vers les étendues… et je compris.
« Tu… tu veux partir avec moi… ? »
Je restais sans voix. Nous avions passé tellement de temps ensemble, ici, au Refuge que j’en avait oublié que ce n’étais pas mon Pokémon et qu’il était possible que nous partagions plus que les moments que je passais au Refuge. Il pourrait me suivre dans mes missions, dans mes aventures…
« Je… oh… Oh ! »
Je cherchais mes mots, trop secouée par l’enchainement d’évènement de cette journée.
« Tu… tu es certain… ? Je… je ne sais pas quoi dire… Dehors ça peut être dangereux et je ne suis pas forcément assez forte pour pouvoir te protéger et… »
La petite musique apaisante retentis à nouveau dans mes oreilles, calmant toutes mes angoisses. Le Nanméouie posa à son tour une patte sur ma tête, et me souris largement, toujours agité de cette hâte qui le caractérisais. Je lui rendis son sourire avant de me relever, puis je sortais le cœur battant du Refuge, accompagnée pour la première fois par mon Pokémon partenaire.