La texture des pavés sous ses pieds est un changement bienvenue. Cela fait une bonne paire d'heures qu'il est en route, et l'herbe commençait à le fatiguer un peu. Mentalement hein, pas physiquement.

L'homme regarde autour de lui, un air pas spécialement heureux sur le visage. Comment est-ce qu'ils avaient appelé ça ? Bourg-asque ? C'était quoi l'idée ? Tenter un jeu de mot ? Dommage que ça ne marche pas, parce que autant une bourrasque c'est quelque chose, autant il n'a jamais entendu ce mot avec un G en plein milieu.

Ses pas le guide jusqu'à ce qui semble être le centre ville. Les gens s'y affairent sans vraiment prêter attention à ce qui se passe autour d'eux. Plusieurs fois, un personne manque de rentrer dans l'homme musclé, ce qui aurait été une très mauvaise idée. En tout cas, ce monde indique que c'est un bon endroit pour mendier un peu.

Chacun a ses talents dans la vie. Certains sont bons derrière un bureau. Certains sont chanteurs. Daisuke, lui, est un artiste martial. En plus, des rangers lui ont promis un peu d'argent si il fait quelques shows sur la route. D'un côté, ça lui fait de l’entraînement, de l'autre, ça lui fait de l'argent.

Il se dirige vers le centre de la place et détache le tapis qu'il a enroulé dans le dos. C'est un vieux tapis qui lui sert de couchette et de tatami d’entraînement quand le besoin s'en fait sentir, ce qui est exactement le cas présentement.

Il se frotte le pieds et se fends d'un petit salut avant de monter sur la paillasse avant de donner un coup de poing droit devant lui et de pousser un Kiai plutôt fort. Ca a le mérite d'attirer l'attention de quelques badeaux. Il pose ensuite une petite corbeille devant le tapis et invoque Enpi, son Machoc.

« Regarde. Imite. Apprends. »

Sa voix est un peu rocailleuse. Cela fait un moment qu'il n'a pas parlé. Il pousse un profond soupir puis laisse parler son corps. Enchainement un du premier Kata de Safrania, c'est parti.

Poing.

Inspiration.

Poing.

Expiration.

Pied.

Inspiration.

Pied.

Expiration.

Les mouvements du karateka sont réglés comme du papier à musique, imprimés d'un rythme que tout le monde peut approcher, mais que seuls ceux qui ont étudié peuvent vraiment comprendre. A côté de lui, Enpi, le petit Machoc, tente tant bien que mal d'imiter les gestes de son dresseur et, pour être juste avec lui, ne se débrouille pas trop mal. Après, il serait mentir que de dire que c'est un débutant. Si le pokémon n'a encore jamais combattu réellement, il a vécu le début de sa vie baigné dans les arts martiaux.

Autour d'eux, quelques personnes regardent la démonstration. Ce sont surtout des gamins qui forcent leurs parents à rester quelques minutes. Même si il essaie de se couper entièrement du monde, Daisuke n'arrive pas à filtrer tout ce qui se dit. « Regarde maman, on dirait comme dans les films ! », dit une demoiselle. « Tu te souviens des vacances à Kanto ? On dirait le spectacle que l'on a vu, tu ne trouves pas ? », explique un père à son enfant.

Au moins, Daisuke peut se dire qu'il remplit sa part du marché. Sa démonstration rappelle aux gens l'air lointain de Kanto.

Puis la concentration de l'homme est brisée par un grattement pas loin de lui. Qu'est-ce que … Il s'arrète, passe sa main sur son front pour en retirer la sueur et regarde dans la direction du son désagréable. Un Rattata qui fouille dans des poubelles. Un sourire un peu mauvais nait sur les les lèvres du dresseur.

« Enpi. Demonstration. Maintenant. »

Si le Machoc est un peu stressé pour son premier combat, il tente tant bien que mal de le cacher la petite appréhension qu'il ressent. Plus que de perdre, ce dont il a peur, c'est de décevoir son dresseur. A pas de loup, il avance vers vers le petit rat avant de libérer un déluge de coups sur le pokémon sauvage, qui est bien vite mis hors d'état de nuire.

« Bien. »

La forme n'était pas parfaite, mais pour une première fois, Daisuke est satisfait. Il sait aussi qu'après une attaque Close Combat comme ça, son pokémon sera épuisé.

« Baie. Mange. Bravo. »

Le petit pokémon va se servir et Daisuke reprends ses katas.

Daisuke n'accorde même pas un regard à son pokémon alors qu'il va manger une des baies dans la besace de son dresseur. Il ne faut pas voir là un manque de considération, au contraire. Ce Machoc est un grand garçon qui n'a pas besoin d'être couvé. Du moins, c'est ce que pense Daisuke.

Doucement, mais sûrement, quelques personnes déposent quelques petits objets dans la corbeille de l'artiste martial. Ce n'est pas grand chose, mais ça lui permettra d'avoir un bon repas chaud dans le ventre ce soir, et c'est tout ce qui compte, au final. Enfin, il espère. Il n'est pas encore totalement au fait avec le système de ressources qui a place sur l'île, mais ça viendra.

Après encore quelques enchaînements, le jeune homme s’arrête. Même si un voile de sueur couvre sa peau, il est loin d'être épuisé. Le public, lui, par contre, semble en avoir eu assez, et il n'arrive pas à garder leur attention. Ils doivent vouloir reprendre leur vie. Normal. Le petit homme ramasse son panier et va pour en vider le contenu dans son sac, et remarque un rattata étrange qui s'approche d'une démarche qui se voulait sûrement sournoise.

Daisuke prends une bonne inspiration et lance un coup de pied descendant qui frappe le tapis dans un bruit sourd a une dizaine de centimètres du pokémon sauvage. Ce bruit, accompagné du Kiai que pousse l'homme, fait fuir le pokémon sauvage sans demander on reste. Parfait. Il ne lui reste plus qu'a rouler son tapis et reprendre sa route.